En cette fin d’année 2021, l’industrie du chanvre remporte une nouvelle bataille : le taux de THC autorisé passe de 0.2% à 0.3%. Une excellente nouvelle pour les agriculteurs, qui auront accès à davantage de variétés, en plus des nouveaux dispositifs financiers mis en place pour booster le secteur.
Taux de THC légal en augmentation, qu’est-ce que ça change ?
Le débat concernant le taux maximum de THC dans les variétés de cannabis autorisées au sein de l’UE a commencé le 23 octobre 2020, lorsque le Parlement européen a voté en faveur de la motion défendue depuis de longues années par l’Association européenne du Chanvre industriel (EIHA).
Mais, comme de coutume, de nombreux compromis et discussions ont été nécessaires avant d’arriver à un accord commun. En effet, le taux maximal de THC autorisé n’était pas l’unique réforme en question. Quoi qu’il en soit, le texte adopté par la Politique agricole commune (PAC) le 24 novembre 2021 aboutit à plusieurs changements, dont :
- La mise en place de facilités de paiement ainsi que de subventions pour les agriculteurs du chanvre ;
- L’élargissement des variétés de Cannabis S. autorisées et inscrites dans le catalogue officiel de l’UE ;
- La possibilité de planter du chanvre dont le taux de THC maximal est de 0.3%, pourvu qu’il respecte les lois nationales.
Pour rappel, jusqu’à preuve du contraire, sur le territoire français ce taux reste plafonné à 0.2%, contrairement à l’Italie (0.6%) et à la République Chèque (1%). Vous l’aurez compris, techniquement, il faudra encore patienter avant que les plants de Cannabis cultivés en France puissent frôler les 0.3% de THC …
0.3% de THC, le chiffre d’or ?
L’augmentation du taux de THC autorisé dans les cultures de chanvre est accueillie avec beaucoup d’enthousiasme, et c’est justifié ! Aux États-Unis et dans la majorité des pays du monde, il y a belle lurette que ce taux a été fixé (et dépassé !). Il était grand temps que l’UE fasse un pas en avant.
Mais chez Le Guide, il y a une question qui nous brûle les lèvres … Pourquoi 0.3% ? Est-ce un taux arbitraire ?
Évolution du taux légal de THC
Petit rappel, le tétrahydrocannabidiol (THC), est une molécule qui possède des propriétés psychoactives. Considérée comme une substance dangereuse et addictive, sa vente et sa consommation sont régulées dans la majeure partie du monde. Tout comme le cannabis, puisque le THC est l’un de ses principaux cannabinoïdes, conjointement avec le cannabidiol (CBD).
Après l’ère hippie, le cannabis jouit d’une mauvaise réputation auprès des autorités. La plante millénaire a d’ailleurs frôlé l’interdiction totale.
Mais en 1964, le professeur Raphaël Mechoulam et son équipe isolent la molécule responsable de ses effets psychoactifs, permettant ainsi aux agriculteurs de défendre leurs intérêts et ceux des variétés naturellement pauvres en THC réunies sous l’appellation de chanvre.
L’industrie du chanvre est historiquement très liée à l’agriculture française. Et puis, elle offre d’innombrables débouchées, allant de la fibre textile jusqu’au matériel de construction écologique.
Du coup, afin de maintenir le secteur à flot, le taux de THC est d’abord limité à 0.5%. Puis abaissé à 0.3%, puis à 0.2% en 1999. Avant de remonter à 0.3% grâce au vote favorable du Parlement européen émis en novembre 2021.
Pourquoi 0.3% ?
Si le but de la manœuvre est d’inhiber les propriétés psychoactives du THC chez les consommateurs de cannabis, alors il est d’espérer que des études ont montré qu’au-delà de 0.3%, il existe des risques avérés d’hallucinations en tous genres.
Eh bien, que nenni !
En 1976, le célèbre botaniste américain Arthur Conquist, père du système de classification des plantes à fleurs, ainsi que son collègue, le Dr Small, publient une étude au sujet de la toxicité du Cannabis Sativa.
Il y figure le fameux taux de 0.3% de THC, considéré par les deux scientifiques comme la concentration de référence permettant de distinguer les variétés à faible taux de THC d’un côté, des variétés à forte concentration de l’autre.
C’est de ces travaux-là dont est tiré le taux à 0.3%.
Ce qu’il faut savoir, c’est que les travaux réalisés sous la tutelle du botaniste n’avaient aucunement pour but de déterminer le taux de toxicité de la plante, que ce soit dans le cadre d’une utilisation médicinale, ou pour un usage récréatif.
Le but de cette étude était simplement de faciliter la classification des sous-variétés de Cannabis S. Ce qui signifie qu’une plante qui abrite plus de 0.3% de THC n’induira pas forcément des effets psychédéliques. Et que ce taux a donc été fixé de manière … arbitraire, oui.
Taux de THC légal dans le reste de l’Europe …
0,3%, c’est toujours mieux que 0.2%. Mais gardons à l’esprit qu’il reste encore du chemin à parcourir. Chez nos voisins helvétiques par exemple, ce taux est fixé à 1%. Et, à notre connaissance, ces produits CBD, dont les fleurs, n’ont pas plus d’effets psychédéliques que ce que l’on peut trouver en France où le taux est encore fixé à 0.2%.
Toutefois, une chose est sûre, dans un pays comme la Suisse, l’Italie ou la République Chèque, les fleurs affichent des taux de CBD bien supérieurs à ceux de la France. Les huiles de CBD full-spectrum présentent également bien plus d’intérêt aux yeux de qui souhaite profiter de l’effet d’entourage. Enfin, rappelons que le THC, outre ses propriétés psychoactives, est également connu pour ses propriétés médicinales.
Espérons que le passage de 0.2% à 0.3% de THC soit le premier pas vers une dédiabolisation de la molécule, et que la France fasse, cette fois-ci, le choix de s’aligner sur ce nouveau taux … Affaire à suivre !