Alors que les notions d’effet d’entourage et d’extrait full spectrum sont à peine comprises, certains experts vont plus loin ! En fait, chaque variété de cannabis renfermerait des propriétés propres.
Concrètement, on pourrait imaginer un patient prendre quelques gouttes de telle variété le matin contre les douleurs chroniques, puis quelques gouttes de telle autre variété le soir pour mieux dormir.
Cette approche est révolutionnaire, car elle pourrait rendre les médicaments à base de cannabis bien plus efficaces en plus de leur apporter une meilleure légitimité ! Ce serait le début d’une médecine naturelle et sur-mesure.
Mais cela suggère une extraction dite “strain-based” (= en fonction de la variété), laquelle suppose une génétique stable et durable, que seul le clonage par micropropagation peut fournir.
Deux aspects extrêmement intéressants que l’on se propose de vous expliquer !
L’extraction basée sur la variété de cannabis (extraction strain-based) : qu’est-ce que c’est et qu’est-ce que ça implique ?
Effet d’entourage et full spectrum
Il faut savoir qu’on trouve plus de 500 substances différentes dans les fleurs de cannabis ! Parmi ces substances, on trouve de la graisse végétale et de la chlorophylle, mais ce qui nous intéresse généralement, ce sont ces molécules-là :
👉 Les cannabinoïdes comme le CBD et le THC, deux cannabinoïdes majeurs, mais aussi le CBG (cannabigérol), le CBN (cannabinol), ou encore le CBC (cannabichromène) ou même le THCV. Nous n’allons pas tous les lister, il y en a plus de 120 !
👉 Les terpènes, comme le myrcène, le linalool ou le pinène. Ce sont des substances odorantes et gustatives, mais pas que ! Elles sont en effet utilisées en aromathérapie pour leurs propriétés thérapeutiques ;
👉 Les flavonoïdes, comme les cannflavines (A, B et C) que l’on trouve uniquement dans le cannabis et dont les propriétés anti-inflammatoires sont documentées.
De plus en plus d’études mettent en évidence une action synergique entre les différents composés du cannabis que l’on appelle “effet d’entourage”. C’est la raison pour laquelle les produits (et notamment les huiles) élaborées à partir d’un extrait full spectrum (spectre complet) sont considérés comme plus efficaces que ceux qui ne contiennent que du CBD (ou un mélange THC/CBD) à l’état pur.
En effet, selon les dernières publications scientifiques, les extraits full spectrum couvrent plus de maladies et sont bien plus faciles à doser.
Singularité des variétés de cannabis : bien plus qu’un ratio THC/CBD !
Comme nous venons de le dire, chaque variété est unique de part : son ratio THC/CBD, sa composition en cannabinoïdes mineurs, son profil terpénique et sa teneur en flavonoïdes.
Jusqu’à maintenant, l’industrie pharmaceutique distingue les variétés de cannabis uniquement en fonction de leur ratio THC/CBD. De ce fait, les huiles de cannabis élaborées à des fins médicales proviennent de différentes variétés. On obtient ainsi une sorte de pot pourri de plusieurs variétés.
Mais selon certains experts comme Peter Vermeul, c’est une grave erreur !
En réalité, il faudrait considérer chaque variété pour sa singularité moléculaire. Cela suggère une extraction full spectrum de chaque variété de cannabis.
Cette théorie, selon laquelle chaque variété offre différentes propriétés, ne sort pas de nulle part. À ce sujet, on sait maintenant que la distinction entre Indica et Sativa ne s’explique pas exclusivement par le ratio THC/CBD de la fleur ! Ce serait en fait l’œuvre de son profil terpénique, conjointement à sa teneur en cannabinoïdes.
Un autre exemple assez surprenant est celui du cas d’un garçon de 15 ans atteint d’une forme grave du syndrome de la Tourette (cas rapporté par Peter Vermeul).
Ce garçon a d’abord été soigné avec une huile élaborée exclusivement à partir d’une variété appelée “Felina”. Cette huile a montré une efficacité remarquable au bout de 20 minutes seulement. Mais, au bout d’un certain temps, croyant que cela n’aurait aucun impacte, le garçon a changé d’huile. Mais elle s’est montrée totalement inefficace.
Il s’avère que cette huile-là était élaborée à partir de plusieurs variétés de cannabis, et non uniquement avec de la Felina… Coïncidence ? 🧐
Huiles de cannabis médical en fonction de la variété : avantages et challenges
Comme vous vous en doutez, élaborer des huiles de cannabis en fonction de la variété présente pleins d’avantages pour les patients·es, mais aussi pleins de défis pour les producteurs !
L’extraction en fonction de la variété : ce que ça pourrait signifier pour les patients
Si l’on pouvait élaborer des huiles de cannabis en fonction de leur variété, cela bouleverserait notre rapport au cannabis médical… Dans le bon sens ! En effet, si réellement le profil moléculaire de la variété a une incidence sur le type d’effets provoqué, alors les traitements à base de cannabis médical seraient :
👉 Plus précis. L’extraction basée sur la variété permettrait de mettre en place des traitements ciblés et sur-mesure. Par exemple, la variété “Charlotte’s Web” est réputée pour son efficacité contre l’épilepsie sévère.
👉 Plus efficaces. L’effet d’entourage pourrait être d’autant plus fort lorsque l’on conserve le profil moléculaire de la variété suggérant une meilleure efficacité.
👉Plus faciles à doser. On sait déjà que les extraits full spectrum sont plus simples à doser que les extraits purifiés, qui ne contiennent que les cannabinoïdes. Si l’on pouvait, en plus de cela, garantir une composition stable d’une huile à l’autre, alors le dosage serait, lui aussi, d’autant plus stable.
En fait, actuellement, la plupart des huiles de cannabis médical sont des blend, c’est-à-dire des mélanges. L’idée de l’extraction strain-based est de standardiser la composition. Ce qui, dans la sphère médicale, représenterait une énorme avancée.
Les défis supposés par l’extraction “strain-based”
Malgré ses nombreux avantages, cette méthode présente également plusieurs défis importants pour les producteurs.
Techniquement parlant, le processus d’extraction basé sur la variété n’est pas différent du processus d’extraction traditionnel. En effet, les fleurs sont mélangées à un solvant (généralement du CO2 à l’état supercritique ou de l’éthanol), puis ce mélange est filtré et purifié.
En fait, le changement se trouve bien plus en amont : au moment de culture des fleurs ! En effet, si on veut élaborer des huiles en fonction de la variété et dont la composition ne change pas, alors il faut :
1️⃣Que l’on soit capable de cultiver des variétés dont la génétique ne varie pas d’une plante à l’autre ;
2️⃣Que cette génétique reste stable dans le temps.
Et c’est là que ça se complique un peu…
Comment préserver la génétique d’une variété de cannabis ?
Comme nous venons de le voir, standardiser l’offre d’huiles de cannabis en fonction de la variété suggère un défi majeur. Celui de préserver la génétique de la variété, d’une plante à l’autre, et d’une génération sur l’autre.
La plante mère : une reine parmi les siennes
Pour garantir la stabilité génétique dont nous parlions à l’instant, les producteurs devront sélectionner une plante mère. C’est-à-dire, la référence génétique de toutes les générations suivantes et à venir.
Méticuleusement sélectionnée, cette plante mère sera, à l’image de la reine dans les ruches, la plus précieuse de toutes ! Il s’agira de la protéger envers et contre tout, afin de garantir sa survie, mais aussi et surtout, éviter quelconque modification de son profil moléculaire.
En effet, comme vous le savez peut-être, certains facteurs environnementaux (lumière, température, nutriments, etc.) peuvent altérer l’expression de ses gènes. C’est ce que l’on appelle “l’épigénétique”.
Cette altération peut se traduire par une modification du ratio THC/CBD, mais aussi de son profil terpénique et de la concentration en flavonoïdes. Il est donc absolument crucial de chouchouter la plante mère comme si toute la production — actuelle et à venir — dépendait d’elle, car… c’est le cas !
Le clonage par micropropagation
Une fois que l’on a notre plante mère, il va falloir penser à la reproduire. En effet, on ne peut pas prendre le risque de simplement planter des graines appartenant à la même variété. Celles et ceux qui se sont essayés à la culture de cannabis savent ô combien les caractéristiques de chaque plante sont imprévisibles ! Ce, même si l’on veille à ce que les conditions de culture soient identiques.
Le clonage par bouture, largement pratiqué, pourrait être une solution, car il permet d’obtenir des plantes-enfant avec la même génétique que la mère. Cependant, le bouturage a ses limites lorsqu’on utilise une seule et même plante-mère !
La solution serait donc d’utiliser une technique de clonage plus avancée, par “micropropagation”. Grosso modo, le processus consiste à :
👉 Prélever de petits morceaux de tissu (feuilles, racines, méristèmes) sur une plante mère saine.
👉 Puis de les cultiver in vitro. Les explants sont placés dans des milieux de culture stériles contenant tous les nutriments nécessaires à leur croissance.
👉 Ensuite, les explants se multiplient et forment de nouvelles plantules, lesquelles sont ensuite transférées dans un milieu favorisant l’enracinement.
L’extraction “strain-based” : notre conclusion
L’extraction de cannabis basée sur la variété représente bien plus qu’une innovation technique. Sans exagération aucune, elle incarne ni plus ni moins l’avenir de la médecine dans l’industrie du cannabis.
En effet, comme nous l’avons vu, en préservant la composition chimique unique de chaque variété, cette méthode permet de fournir des traitements sur-mesures plus efficaces et plus faciles à doser. D’ailleurs, certaines entreprises comme CBD Spain, Charlotte’s Web et Canopy Growth travaillent déjà sur l’extraction en fonction de la variété.
Espérons que ce type d’approche devienne une tendance 🤞
