Avez-vous remarqué que l’on parle de manière générique de “produits CBD” alors qu’en réalité, certains d’entre eux contiennent d’autres cannabinoïdes comme le CBG ou le CBN, voire même l’ensemble du bagage moléculaire de la plante ?
Comme nous allons le voir, cet abus de langage n’est pas si inoffensif que ça !
En effet, à force de mettre en avant le cannabidiol (CBD), on en oublie de communiquer au sujet des extraits full spectrum. Or, selon des données scientifiques récentes, les produits qui contiennent toutes les molécules du cannabis seraient plus efficaces que ceux élaborés avec des cristaux de CBD purs. On vous en dit plus !
Comment le CBD est-il devenu connu ?
Pour comprendre l’origine de l’engouement pour le CBD, il faut remonter à sa découverte, puis à l’histoire de Charlotte Figi qui le rendra célèbre dans le monde entier.
La première variété de cannabis riche en CBD
Peut-être le savez-vous, le cannabidiol a été découvert dans les années 1940 par Roger Adams. Sa structure chimique a ensuite été étudié dans les années 1960 par Raphaël Mechoulam. Le tétrahydrocannabinol (THC), quant à lui, a été découvert dans le même temps.
À ce moment-là, bien que la consommation de cannabis battait son plein, le grand public ne connaissait ni le CBD ni le THC. Tout ce qu’on savait, c’est que ses fleurs provoquaient un état de plénitude fort agréable, et c’était suffisant. ☮️
Puis un beau jour, une équipe de breeder (= personnes qui croisent les variétés de cannabis entre elles) ont mis au point une variété pour le moins étrange, puisqu’elle ne provoque aucun effet hallucinogène. Les Stanley Brothers ont d’ailleurs baptisé leur découverte “Hippies Disappointment”.
En fait, il ne s’agissait ni plus ni moins que d’une variété pauvre en THC et riche en CBD, similaire à ce que l’on peut aujourd’hui acheter de manière légale dans n’importe quelle boutique CBD.
Inutile de dire que ce type de variété a été boudé par la communauté des consommateurs de marijuana ! En revanche, certains laboratoires pharmaceutiques y ont vu une belle opportunité…
Le cas de Charlotte Figi
Aujourd’hui, la “Hippies Disappointment” est plus connue sous le nom de “Charlotte’s Web”, en hommage à la petite Charlotte Figi, fillette atteinte d’une forme rare d’épilepsie, soignée avec de l’huile de CBD.
Son cas a été très médiatisé. Il faut dire que l’huile de CBD a permis de passer d’une moyenne de 300 crises par semaine à seulement une. Mais ce que les médias n’ont pas toujours dit, c’est que l’huile de CBD en question ne se caractérise pas uniquement par sa faible teneur en THC et sa haute concentration en CBD. Il s’agit en effet d’une huile de CBD full spectrum !
Et c’est sans doute à partir de ce moment-là que le CBD, en tant que molécule, s’est imposé sur les autres substances synthétisées dans les fleurs de cannabis.
En effet, que ce soit dans les médias, ou dans les rapports scientifiques, on pouvait lire : “les bienfaits du CBD sur l’épilepsie” et non “les bienfaits des composés du cannabis sur l’épilepsie”.
Cela, cher·es ami·es, ça fait pourtant toute la différence !
L’arrivée des cristaux de CBD
Partout, on parlait volontiers “d’huile de CBD”, et beaucoup moins “d’huile de cannabis”. On peut facilement deviner pourquoi : le cannabis a mauvaise réputation, voilà tout.
Malgré tout, si utiliser le terme “CBD” en lieu et place de “cannabis” permet de contourner certains obstacles marketing, ce n’est pas suffisant pour duper les organismes régulateurs !
C’est là que l’isolat de CBD fait son entrée dans l’industrie, et devient rapidement la coqueluche des fabricants de produits dérivés du cannabis.
Grâce aux techniques d’extraction innovantes telles que l’extraction au CO2 supercritique, les fabricants sont désormais capables de cibler une molécule et de l’extraire à l’état pur. En effet, l’isolat de CBD n’est rien d’autre que des cristaux de CBD.
L’isolat de CBD est facile à doser, totalement dépourvu de THC (0,000%) et il ne modifie ni l’odeur, ni le goût, ni la couleur, ni la texture de l’huile à laquelle il est ajouté.
Avouons que c’est pratique, et pas seulement pour élaborer des produits destinés au grand public, ça l’est aussi pour l’élaboration de médicaments !
Et c’est là que la sphère scientifique s’est momentanément détournée des composés de la fleur pour se concentrer sur le CBD de manière isolée.
Les extraits full spectrum, mis “au placard” malgré une efficacité supérieure ?
Avec le THC, le CBD est l’une des deux principales molécules du cannabis. Certaines variétés abritent en effet jusqu’à 25 % de CBD, tandis que les autres substances atteignent difficilement le 1 %.
Sachant cela, on est tenté de se dire que le CBD est le principal responsable des effets de la variété.
Mais ce serait oublier un aspect très important : le cannabis abrite plus de 500 substances différentes. Même si chacune d’entre elles sont présentes en très faibles quantités, mises bout à bout, elles sont en réalité majoritaires !
Définition d’un extrait full spectrum
Un extrait full spectrum est un extrait qui contient TOUTES les molécules synthétisées dans les fleurs de cannabis. Cela comprend :
👉 Les cannabinoïdes majeurs : THC et CBD. Le taux de THC étant rabaissé en dessous de 0,3 % ;
👉 Les cannabinoïdes mineurs : CBN, CBG, CBC, CBT, etc. (il y en a plus de 120) ;
👉 Les terpènes : substances odorantes et gustatives des végétaux qui constituent entre 10 à 40 % du bagage moléculaire total de la plante ;
👉 Les flavonoïdes du cannabis comme la cannflavine.
Ça, c’est la définition la plus courante, celle que l’on peut appliquer à la majorité des produits full spectrum que l’on trouve dans le commerce.
Cependant, pour certains puristes, un vrai full spectrum ne contient pas de cannabinoïdes en tant que tel (CBD, THC, CBG), mais des cannabinoïdes sous forme acide (CBDa, THCa, CBGa).
Pour comprendre cette nuance, il faut savoir qu’à l’état naturel, c’est-à-dire, dans les fleurs de cannabis, on trouve les cannabinoïdes uniquement sous leur forme acide. C’est sous l’effet de la chaleur, lorsque l’on allume le joint, la pipe ou le vaporisateur, que ces formes acides vont prendre leur forme “mature”. C’est un processus que l’on appelle décarboxylation.
La majorité des extraits full spectrum que l’on trouve dans le commerce ont été décarboxylés et ne contiennent donc pas de cannabinoïdes acides.
Toutefois, certaines études récentes suggèrent qu’ils ont un rôle thérapeutique largement plus important que ce que l’on croit. À titre illustratif, le CBDa aurait des propriétés anti-inflammatoires bien plus puissantes que celles du CBD.
Une variété = un profil moléculaire unique = des effets uniques ?
Le full spectrum suggère que l’on considère l’ensemble des molécules synthétisées dans le cannabis. Mais il y a un autre aspect rarement pris en compte : le fait que chaque variété de cannabis offre un profil moléculaire différent.
En effet, au-delà du fait que le rapport THC/CBD puisse varier d’une variété à l’autre, il faut également prendre en compte le profil terpénique, ainsi que toutes les variables possibles concernant les autres substances présentent dans les fleurs.
Un cas, relaté par Peter Vermeul (spécialiste d’extraits de cannabis en Espagne), permet de comprendre l’importance de considérer chaque variété dans sa singularité moléculaire.
Mitchel, un garçon alors âgé de 15 ans atteint d’un syndrome grave de Gill de la Tourette, a commencé avec des gouttes de Felina, une variété de chanvre industriel. Il a très bien réagi à cela, en 20 minutes, il était complètement débarrassé de ses tiques et de son inconfort.
Après trois mois, il a essayé une autre huile de CBD. Cette huile de CBD était fabriquée à partir de quatre plantes de CBD différentes, les pourcentages de CBD et de THC étaient quasiment identiques, mais le produit n’a pas fonctionné du tout.
Finalement, Mitchel est revenu à la première huile de CBD, réalisée à partir de l’extrait de Felina. En 20 minutes, il était à nouveau débarrassé de ses attaques. À ce jour, plus de 3 ans plus tard, il est toujours pratiquement sans crises.
Certes, ce n’est qu’un cas isolé, mais cela montre bien l’importance de considéré chaque variété de cannabis comme unique : avec une composition unique, et peut-être, des effets uniques !
L’effet d’entourage, ou “le principe de synergie”
Enfin, on ne peut pas parler du full spectrum sans parler de l’effet d’entourage. Il s’agit ni plus ni moins du principal argument en faveur des extraits à spectre complet.
Formulée à la fin des années 90 par Raphaël Mechoulam et son collègue Shimon Ben-Shabat, la théorie de l’effet d’entourage propose que les différents composés présents dans le cannabis peuvent interagir entre eux pour créer des effets synergiques.
Selon cette théorie, ces composés agissent en coordination pour produire un effet global plus complexe et plus puissant que si les composés étaient isolés.
Plus tard, le Dr Ethan Russo, neurologue et chercheur en psychopharmacologie, a contribué au développement de plusieurs médicaments (Epidiolex et Sativex) formulés à base d’extraits de cannabis dont la composition repose sur la théorie de l’effet d’entourage.
Cependant, ces traitements se concentrent surtout sur l’effet synergique qu’il y a entre le CBD et le THC et non sur l’ensemble des molécules. Les recherches au sujet de vrais extraits full spectrum sont encore rares, même si l’on voit de plus en plus de publications au sujet de l’importance des terpènes et des flavonoïdes.
L’isolat de CBD… Vraiment “moins bien” que le full spectrum ?
Comme nous l’avons vu, plusieurs données indiquent que les extraits full spectrum présentent de nombreux avantages en termes d’utilisation thérapeutique. Mais cela veut-il pour autant dire qu’il faut condamner l’isolat de CBD ?
Le CBD : des bienfaits bien réels !
Le CBD est la molécule issue du cannabis la plus étudiée de toutes. Et on ne peut pas nier que les recherches sont extrêmement prometteuses ! En effet, même si des études supplémentaires sont nécessaires, le CBD serait :
👉 Anxiolytique : il aiderait à réduire les niveaux de stress grâce à son action sur la production de certaines hormones clés telles que la dopamine et la sérotonine ;
👉 Anti-inflammatoire : grâce à sa capacité à moduler la réponse immunitaire, le CBD pourrait aider à diminuer l’inflammation ainsi que la sensation de douleur associée ;
👉 Neuroprotecteur : cette action anti-inflammatoire concernerait également les neurones situés dans le cerveau. Le CBD pourrait en effet réduire l’inflammation neuronale à l’origine des crises d’épilepsie, mais aussi du déclin cognitif.
Toutefois, comme nous allons le voir, la prise de CBD sous sa forme pure implique quelques complications qui pourraient expliquer pourquoi certaines personnes ne ressentent aucun effet particulier.
La question du dosage
Comme vous le savez peut-être, la question du dosage des produits à base de CBD n’est pas anodine. En effet, il n’existe pas de posologie officielle, et la seule manière de déterminer le bon dosage est de commencer par une faible dose, puis de l’augmenter progressivement jusqu’à obtenir les résultats escomptés.
Une telle complexité du dosage s’explique par le fait que nous sommes tous dotés d’un système endocannabinoïde propre. C’est-à-dire que certaines personnes ont plus de récepteurs que d’autres, lesquels sont répartis de manière unique dans le corps. Par ailleurs, tous les systèmes endocannabinoïdes ne fonctionnent pas de la même manière.
Bref, il n’existe, a priori, pas de dosage universel.
Mais ce qu’il faut également savoir, c’est que le CBD, de manière isolé, est d’autant plus complexe à doser que l’extrait full spectrum.
En effet, selon certaines études, le CBD suit une courbe d’efficacité en cloche (ou “U inversé”). Concrètement, cela signifie que si l’on dépasse une certaine dose, l’efficacité diminue. Au contraire, les extraits full spectrum présentent une courbe d’efficacité plus stable et régulière, suggérant ainsi que plus l’on augmente la dose, plus les effets sont notables.
Les interactions médicamenteuses
Enfin, il faut également prendre en compte le fait que le risque d’interactions médicamenteuses est plus élevé avec l’isolat de CBD qu’avec l’extrait full spectrum.
En effet, la pureté des cristaux de CBD permet d’en consommer une forte dose, ce qui n’est pas forcément un problème en soi, puisque l’innocuité du cannabidiol a été démontrée jusqu’à 1500 mg/jour. Cela équivaut à un flacon entier d’huile de CBD dosée à 15 %.
Toutefois, lorsque nous utilisons de l’huile de CBD à haut pourcentage, à base de cristaux de cannabis, et que certains médicaments sont utilisés en même temps, cela peut conduire à une surdose du médicament habituel.
En effet, il faut savoir que le CBD a un effet inhibiteur sur les enzymes hépatiques qui sont impliquées, entre autres, dans la dégradation et la conversion du médicament.
C’est la raison pour laquelle il faut toujours consulter un médecin avant de prendre du CBD — surtout une forte concentration — et à plus forte raison si vous suivez un traitement.
CBD pur vs full spectrum : notre conclusion
CBD pur ou full spectrum, telle est la question ! Et chacun est libre d’y répondre comme il le souhaite, à condition d’avoir toutes les cartes en main pour que cette décision soit éclairée ! Nous espérons que cet article vous permet d’y voir un peu plus clair.
En ce qui nous concerne, nous pensons que Dame Nature se trompe rarement, et que, si les fleurs de cannabis abritent plus de 500 substances, c’est pour une bonne raison !
Et sur ce, l’équipe Le Guide vous dit à très bientôt ! ✌️